Interview croisée : le timbre comme outil pédagogique et de sensibilisation

L’équipe du programme Nature 2050 a contribué à l’élaboration du kit pédagogique « À nous d’agir pour la Terre », développé par l’association de loisir philatélique Adphile à l’attention des écoles élémentaires et secondaires.

Ce kit, construit en 2020 et diffusé en 2020/2021, utilise le timbre postal comme support de sensibilisation à la préservation de la biodiversité et à ses interactions avec le dérèglement climatique. En tout, 90 000 enfants de 7 à 12 ans ont reçu et fait usage de ce kit, découvrant ainsi le concept de solutions fondées sur la nature et des exemples très concrets de telles solutions déployées dans le programme Nature 2050.

À travers cette interview croisée, Florence Fraboulet, Directrice générale de l’Adphile, Hélène Breysse et Anne-Claire Even, enseignantes aux écoles Antoine Chantin à Paris (75) et Penn ar Ru à Lannion (22) partagent leurs expériences sur l’usage de cet outil pédagogique original et sur son impact sur les élèves.

Qu’est-ce qui vous a motivé à choisir le timbre comme support de sensibilisation des enfants aux enjeux environnementaux ?

FLORENCE FRABOULET :

Depuis plusieurs années, l’Adphile intègre dans ses objectifs la contribution à la préservation de la biodiversité et de l’environnement. Le timbre est un support apprécié des enfants et du grand public. Même s’il est moins visible aujourd’hui, il recèle d’une certaine magie et d’une beauté reconnue. Il est aussi représentatif de l’évolution de nos rapports à la planète et à la nature. Il nous a donc semblé pertinent de développer un outil ludique et pédagogique pour faciliter le travail des enseignants avec leurs élèves sur ces sujets. Nous avons constaté que les premiers timbres sur la nature étaient plutôt dédiés à la beauté des paysages et que, peu à peu, des timbres sur les gestes écologiques sont apparus : faire du vélo ou des économies d’énergie, éviter d’acheter des fraises en hiver, etc. Un timbre a également été réalisé pour la COP21 par une étudiante de l’école de design de Saint Etienne.

HÉLÈNE BREYSSE :

Le développement durable est le défi essentiel que nous avons à relever collectivement. L’éducation à ce sujet faisant partie des programmes de l’Education Nationale, c’est tout naturellement que j’ai été motivée par l’utilisation du kit Adphile dans ma classe.

Par sa richesse et son originalité, ce type de support permet des débats fructueux entre les élèves. Ses contenus en permettent une utilisation souple et les affiches fournies, un travail pluridisciplinaire intéressant.

ANNE-CLAIRE EVEN :

Certains enfants ne savent plus ce qu’est un timbre ! Hélas, la concurrence des courriels, SMS et autres moyens de télécommunication rend caduque le courrier postal. Pourtant, les timbres sont une source intarissable d’information sur tous les sujets, aussi bien pour découvrir la culture, la biodiversité que l’histoire.

Quels sont les sujets principaux qu’abordent le kit et qu’apportent-ils à vos classes ?

FLORENCE FRABOULET :

Le kit se présente sous la forme d’une frise historique sur les énergies fossiles et la biodiversité, de magazines et d’affiches qui permettent de réfléchir aux quatre thèmes suivants :

• La formation du climat et l’effet de serre,
• Les conséquences des activités humaines,
• Les interactions entre climat et biodiversité,
• Les actions à mener, notamment grâce au programme Nature 2050 de CDC Biodiversité.

Trois exemples de projets concrets de restauration du programme Nature 2050 ont ainsi été présentés aux classes : la Forêt Cévenole, la Friche Kodak et la Ferme de Layat.

HÉLÈNE BREYSSE :

Les affiches fournies sont des points de départ intéressants pour favoriser les questionnements, les échanges entre les élèves. La présentation d’actions concrètes comme celles menées dans le cadre du programme Nature 2050 est utile pour comprendre les solutions qui existent dans la nature pour s’adapter au changement climatique. Cela éclaire les élèves sur ce qui peut encore être fait pour protéger la biodiversité.

ANNE-CLAIRE EVEN :

Les exemples d’actions soutenues par le programme Nature 2050 ont permis aux élèves de mieux comprendre l’importance de préserver la biodiversité pour lutter contre les effets du changement climatique. Ce kit leur permet aussi d’envisager plus globalement les conséquences de leurs actions au quotidien, ce qui est difficile mais important pour eux.

Quelles évolutions des comportements attendez-vous de cet outil ?

FLORENCE FRABOULET

De nombreuses études, telles que Le souci de la nature : apprendre, inventer, gouverner de Cynthia Fleury et Anne-Caroline Prévot, ont montré que sensibiliser les enfants dès le plus jeune âge participe au développement de comportements respectueux et protecteurs de la nature. Cette sensibilisation théorique, à laquelle Adphile participe, doit néanmoins être accompagnée d’un contact avec la nature pour être utile.

HÉLÈNE BREYSSE :

Grâce à cet outil, j’aimerais faire de mes élèves :

• Des écocitoyens éclairés qui apprennent à réfléchir sur l’avenir de leur planète de manière intelligente au regard des évènements et des faits,
• Des « colibris », les élèves adorent cette fable, qui font leur part au quotidien dans la préservation de notre environnement,
• Des messagers qui iront ensuite, grâce à la compréhension des enjeux, porter ces idées importantes dans leurs familles, chez leurs proches.

ANNE-CLAIRE EVEN :

L’éducation devrait influer sur les comportements mais l’école n’est pas suffisante pour cela. Elle n’est qu’une goutte d’eau limitée par rapport aux besoins économiques. Les enseignants essaient de « semer des graines », des connaissances et des façons d’envisager le monde qui les entoure. Nous faisons au mieux mais une évolution des comportements est très difficile à envisager et ne peut donc se mesurer dans l’immédiat. D’ici là, nous allons préserver les vers de terre de la cour d’école et demander de ne pas couper le coquelicot avant qu’il ne soit en graines !

Classe de l’école Antoine Chantin à Paris (75) © Adphile