Dans la baie de Morari, en Nouvelle-Calédonie, l’ONG Conservation International bénéficie de l’accompagnement du Fonds Nature 2050 pour son projet innovant d’installation de pièges à sédiments issus de la vallée de la Coulée. Depuis plus d’un mois, les travaux de pose de supports en bambou ont bien progressé.
La baie de Morari est située dans la partie sud-ouest de l’île principale de la Nouvelle-Calédonie, sur la commune du Mont-Dore. Avec ses 600 hectares, la baie est une zone d’importance régionale écologique et socio-économique et abrite une mangrove de plus de 133 hectares. Cette dernière joue un rôle crucial dans l’atténuation de la force du vent et des vagues et dans la filtration naturelle des sédiments, et abrite de nombreux herbiers et récifs coralliens.
Face à la dégradation des écosystèmes, un projet innovant
Le défrichement, les mines orphelines et l’augmentation des feux de forêts en amont dégradent les capacités de rétention en eau du bassin versant de la Vallée de la Coulée et exacerbent l’érosion naturelle. La quantité de matière transportée par les cours d’eau rejetée au niveau des côtes augmente, dégradant les écosystèmes marins présents dans la baie (récifs coralliens, herbiers et mangroves). Face à cet afflux de sédiments, l’ONG Conservation International porte un projet expérimental d’installation de pièges à sédiments. Ces structures ont vocation à retenir sable, vase et boue transportée par l’eau pour favoriser l’expansion de la mangrove afin de protéger les herbiers et récifs coraliens de la baie. Ce projet innovant fruit d’une mobilisation collective constitue le premier ouvrage de ce type en Nouvelle-Calédonie.
Il s’agit du deuxième projet de l’ONG Conservation International soutenu par le Fonds Nature 2050 : il se veut complémentaire d’une première action menée en amont, pour limiter l’afflux de sédiments dans la baie de Morari. Dans une approche du récif à la crête, la pose de pièges à sédiments s’inscrit dans la continuité des actions menées pour lutter contre la propagation des incendies par la restauration du massif forestier de la Vallée de Coulée via la régénération naturelle assistée. Entre 2022 et 2023, plus de 50 000 graines de 9 espèces différentes ont été plantées par l’association partenaire Red Ground, en plus de la plantation de 1 250 plants forestiers.
L’installation des pièges à sédiments est en cours
Les pièges à sédiments constituent un barrage semi-perméable dont la structure est faite de branchages et de bambous. Les quinze premiers jours d’installation déjà achevés ont permis de poser les poteaux pour 7 des 9 structures parallèles au littoral. Trois types de structures sont testés par l’ONG Conservation International, chacune composée de 3 unités de 30m. L’ensemble est comblé avec de la végétation ou des bambous, puis refermés par l’installation de structures perpendiculaires, qui referment l’ouvrage.
Comme il est impossible d’arrêter totalement le flux de sédiments, les ouvrages serviront de base pour l’implantation progressive de nouvelles mangroves, qui permettront de filtrer l’eau afin d’améliorer sa qualité avant qu’elle n’atteigne le lagon.
Mobilisation élus et associations locales
Soutenus par la commune du Mont-Dore, la Province Sud et le Conseil Coutumier Drubea-Kapumë, une quinzaine de bénévoles participent à l’installation des pièges à sédiments dans la baie, issus de 3 associations locales : Caledoclean, SOS Mangrove et Red Ground. Cinq personnes par association ont été formées sur la sécurité et la mise en place des supports. La formation a été prodigué par une équipe néerlandaise (Witteveen+Bos) venue partager son savoir-faire développé en Indonésie entre 2015 et 2020 où différents prototypes de pièges ont déjà fait leurs preuves.
L’installation se poursuit encore dans la baie de Morari, avec une fin du chantier prévue idéalement d’ici la fin de l’année 2025. Bientôt, des capteurs seront installés aux abords des structures pour mesurer leurs effets sur la sédimentation. Si les résultats sont probants, ces structures perméables pourraient être installées sur une dizaine d’autres sites.
Ce projet est un bel exemple d’approche innovante des Solutions fondées sur la Nature (SfN). Le barrage a vocation à être temporaire, et disparaîtra pour laisser place à la mangrove, qui pourra jouer son rôle de barrière naturelle contre l’érosion côtière et de refuge pour la biodiversité marine. Ainsi, ce projet soutient les activités économiques liées à la pêche dans la baie de Morari en préservant les ressources halieutiques dont dépendent les communautés côtières.
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