3 questions à… Corentin MORICEAU
Tourbière du Plan de l'Eau, Photo de groupe des équipes de CDC Biodiversité et de bpifrance, juillet 2022 © CDC Biodiversité

Corentin Moriceau, porteur de projet Nature 2050 en agroforesterie et lauréat de l’édition 2017 du Concours Arbres d’Avenir.

Quels sont les enjeux écologiques et climatiques propres à votre territoire?

Comment les avez-vous pris en compte dans vos activités agricoles?

Notre ferme est située aux portes de la Drôme Provençale, avec un climat chaud et sec en été, beaucoup de mistral au printemps et à l’automne, et des précipitations importantes (900mm/an) qui ne sont malheureusement pas toujours bien réparties sur l’année. Pour profiter au mieux de ce climat, nous avons besoin d’eau pour irriguer les cultures en été, et d’arbres sur nos parcelles pour freiner le mistral et ses effets néfastes sur les cultures, apporter de la fraicheur aux bêtes en été, et favoriser la biodiversité indispensable à un équilibre agricole pérenne.

Nos 3 familles se sont installées sur la ferme en 2017. Elle était alors dépourvue d’eau en été, et il n’y avait pas un seul arbre sur nos grandes parcelles exposées au Mistral. Nous avions donc beaucoup de travail pour rendre possibles et confortables nos futures activités agricoles : maraichage diversifié, élevage de brebis et de chèvres laitières, verger diversifié et poules pondeuses. Nous avons d’abord réalisé une retenue collinaire de 1500m3, afin de stocker l’eau en hiver et d’irriguer nos cultures maraichères ainsi que le futur verger diversifié en été. Nous avons ensuite envisagé la plantation d’arbres, encouragés par le concours Arbres d’Avenir qui représentait un vrai levier pour réaliser un aménagement agroforestier « massif » sur notre ferme.

En quoi le prix Nature 2050 qui vous a été décerné vous permet-il de renforcer votre projet?

Quelles sont les principales étapes de sa mise en œuvre ?

Remporter le prix Nature 2050 nous a permis de mettre en place un projet agroforestier à la hauteur de nos ambitions. Nos installations ont coûté cher (bâtiments d’élevage, troupeaux, retenue collinaire, serres, irrigation, etc.) et nous n’aurions pas eu le budget nécessaire pour planter autant d’arbres aussi rapidement.

Concrètement, nous aurons planté d’ici la fin de cet hiver 2400 arbres forestiers (haies et arbres de plein vent), avec l’objectif de protéger nos parcelles du Mistral, de créer des couloirs de circulation pour la biodiversité, et de fournir de l’ombre et du fourrage aux animaux.

Nous planterons encore à l’hiver 2019-2020 plus de 1300 arbres fruitiers qui constitueront notre verger diversifié : pommes, poires, pêches, abricots, cerises, prunes, figues et raisins. Ce verger sera parcouru par 500 poules pondeuses, qui profiteront de l’ombre des arbres, pâtureront l’herbe des allées et protègeront les fruitiers en mangeant les larves de ravageurs. Economiquement, ce verger agroforestier devrait permettre de créer deux emplois à plein temps : un, grâce aux poules pondeuses, et un autre, grâce aux fruitiers.

En quoi l’agroforesterie vous permet-elle de répondre aux enjeux de l’agriculture de demain dans un contexte de changement climatique ?

Nous sommes engagés sur notre ferme dans une démarche agroécologique, axée sur la réduction du travail du sol, avec l’objectif de permettre une activité biologique du sol suffisante pour pouvoir le cultiver sans avoir à le travailler mécaniquement. Nous y arrivons aujourd’hui sur notre atelier maraichage, mais nous avons encore beaucoup à expérimenter sur les grandes cultures, les pâtures et le verger. L’arbre a pour nous toute sa place sur notre ferme et notamment pour stimuler cette activité biologique du sol. Grâce à la plantation de près de 4000 arbres et au suivi Nature 2050, nous allons pouvoir suivre l’impact d’un aménagement agroforestier sur la biodiversité, sur l’activité biologique et la qualité du sol, et sur l’évolution du microclimat sur la ferme.

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