3 questions à… Pauline ALLIER
Pauline Allier Agricultrice et éleveuse ovine – Lauréate de l’édition 2019 du Concours Arbres d’Avenir

Pauline Allier, Agricultrice et éleveuse ovine – Lauréate de l’édition 2019 du Concours Arbres d’Avenir

Quels sont les enjeux écologiques et climatiques de votre territoire ?

Cela fait deux ans que je suis propriétaire de ce terrain agricole de 10,7 hectares situé sur la commune de Petit-Tenquin en Moselle, et sur lequel j’ai installé mon activité d’élevage ovin. J’élève des moutons qui proviennent de l’OABA (Œuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoirs), une association de protection des animaux de ferme, qui lutte contre la maltraitance animale. Sur mon terrain, on retrouve un grand bâtiment agricole ainsi qu’une prairie permanente. J’essaie d’avoir un impact minimum sur le sol, que je traite de façon biologique avec le minimum d’intervention mécanique.

Pour autant, je reste confrontée à plusieurs problématiques liées au contexte territorial. À mon arrivée, le terrain était dépourvu d’arbres. Or, avec les épisodes de fortes chaleurs qui se multiplient, le manque d’ombre et la hausse des températures rendent la vie des bêtes difficile. Les sols sont, eux, argileux, et sèchent très facilement. La terre se fend, favorisant alors ruissellement et inondations. Enfin, la ferme est exposée à de vents violents, ce qui altère le bien-être de l’élevage.

Dans ce contexte, pouvez-vous nous expliquer comment vous avez mis en place votre projet d’agroforesterie, soutenu par le programme Nature 2050, et nous en présenter les contours ?

En tant qu’éthologue de formation, j’ai tout de suite identifié divers changements à faire sur la ferme pour favoriser le bien-être de l’élevage. Planter des arbres et des haies sur mes parcelles me semblait indispensable pour protéger le bâtiment du vent, apporter de l’ombrage aux animaux, enrichir les sols et favoriser l’apparition d’une biodiversité plus riche. Je souhaitais également créer une haie champêtre afin de pourvoir délimiter le terrain et à terme, supprimer les barbelés. Cela permettrait de favoriser la circulation de la faune sauvage locale et de leur offrir un abri et de la nourriture.

Mais ces actions n’étaient pas subventionnées, tout du moins en Moselle, et en tant que jeune propriétaire je n’avais pas le budget suffisant. Par le biais de ma participation au Concours Arbres d’avenir, le soutien du programme Nature 2050 m’a donc aidée à répondre à ces besoins et à mettre sur pieds mon projet d’agroforesterie. Et finalement, ce sont 836 arbres et arbustes, dont des fruitiers, qui vont être plantés en haies et alignements intra parcellaires grâce à cet accompagnement. J’ai aussi reçu l’aide de l’association Haies vives d’Alsace, avec qui nous avons travaillé pour sélectionner des essences locales, résistantes et adaptées au terrain. Cette année, nous avons déjà planté les fruitiers (pommiers, poiriers, cerisiers, mirabelliers) et une haie mellifère autour du bâtiment. Et cet automne nous attaquerons la plantation de 240 arbres et arbustes sur un premier rang

Quels sont les bénéfices de l’agroforesterie pour votre activité dans un contexte de changement climatique ?

Par ces différentes actions, je souhaite démontrer les bienfaits des plantations d’arbres et de haies sur les troupeaux d’ovins. Les plantations ne sont pas encore terminées que l’on constate déjà des effets intéressants. Nous avons déjà pu remarquer un changement d’attitude et davantage de sérénité chez les bêtes. En parallèle, les bienfaits pour la biodiversité sont dès à présent visibles, les abeilles et bourdons se multiplient autour de la haie mellifère, les oiseaux sont autour des fruitiers (bergeronnettes, corbeaux, etc.) et j’ai même créé une petite mare où l’on retrouve aussi une belle diversité de libellules et autres insectes.

Je suis en contact avec l’Université de Strasbourg car leurs étudiants en master d’écologie pourraient aussi venir apporter leurs connaissances, s’enrichir et prendre exemple. Je suis très ouverte sur le sujet et j’invite toute personne intéressée à venir sur le terrain, s’inspirer des pratiques ou même prendre des données. Car mon souhait est aussi de sensibiliser et j’espère que je pourrais aussi à mon tour servir d’exemple pour d’autres